Il y avait la mésange bicolore dans le sureau, tout près de la maison, et cet épervier, probablement de Cooper, avec sa calotte plus foncée et le liseré blanc bien marqué au bout de la queue. Lui et moi nous sommes regardés droit dans les yeux, un privilège réservé aux prédateurs que nous sommes tous les deux.
En effet, pour percevoir le relief et évaluer les distances avec suffisamment de précision pour capturer une proie, il faut être doté d'une vision stéréoscopique, c'est-à-dire être capable d'envoyer au cerveau deux images légèrement décalées du même objet. Le chevauchement des deux champs visuels lui permet ainsi de faire des calculs savants qui lui fournissent la mesure précise de la distance de la proie, de l'effort à fournir pour l'atteindre et de la probabilité de réussir. Si la proie est trop éloignée, les chances qu'elle s'échappe augmentent et l'apport d'énergie d'une capture ne compensera peut-être pas la dépense de la poursuite. Tout est à prendre en considération.
À l'autre bout de la chaine alimentaire, la proie, en l'occurrence la mésange bicolore, n'a pas besoin de connaître la distance du prédateur. Tout ce qu'elle veut, c'est être avertie de sa présence et pour ça, il faut être capable d'embrasser le paysage en un seul regard. Inutile d'avoir des yeux tout le tour de la tête, un de chaque côté suffit à lui procure un champ de vision XXL.
Moi évidemment, avec ma vision de prédateur, je n'avais d'yeux que pour la mésange. Je n'avais pas vu arriver l'épervier. C'est elle qui m'a alerté de sa présence en se figeant contre la branche du sureau.
Bonne et heureuse année Jean-François, soignez-vous bien Jipé
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