Il sont nés, les divins corbeaux. Jouez hautbois...

Vous distinguerez mieux les oiseaux en cliquant sur la photo et les vidéos suivantes. Remarquez les trainées de fientes sur la roche, en contrebas du nid

Sur les flancs du mont Saint-Bruno, il y a quelques falaises propices à la nidification de faucons ou de grands corbeaux. Quand je passe à côté, je cherche toujours des indices de nidification dans les infractuosités, des tas de branches et des trainées de fientes sur la roche, car même quand ce n'est pas la saison, les traces restent visibles et les nids sont généralement réutilisés d'une année sur l'autre.

Donc ce matin, je repère à l'oeil nu une cavité assez grande pour installer un nid et en l'examinant avec mes jumelles, je constate que tous les indices indiquent la présence d'un ancien nid. C'est loin, mais je prends mon appareil photo pour documenter. C'est alors que ça se met à bouger; deux oiseaux, des grands corbeaux, s'agitent en croassant. Je ne les avais pas vu aux jumelles. Je me dis d'abord qu'ils se sont trouvés un perchoir pour observer les environs, car les oiseaux n'utilisent pas leur nid comme abri. Aussitôt que les jeunes peuvent voler, les oiseaux quittent leur nid. Éventuellement, ils y retourneront l'année suivante pour nicher.

Je les observe aux jumelles quand ils se mettent à frémir des ailes comme le font les jeunes oiseaux qui veulent être nourris. Je vois alors arriver un troisième individu qui, à ma grande surprise, se met à leur donner la becquée. Je n'en crois pas mes yeux, mais il s'agit bien d'une nichée, en plein mois de janvier. 

Dans le sud du Québec, le corbeau peut pondre dès la mi-février, la durée d'incubation est de 18 à 22 jours et la durée de séjour au nid des jeunes de 35 à 45 jours l'envol. Ici, compte-tenu de la taille des jeunes, ils ne devraient pas tarder à prendre leur envol; ce qui signifie que la nichée a commencé à la fin novembre de l'année dernière, une nichée vraiment tardive...ou hâtive.  

Un monde négligé

La piste inimitable du raton laveur en marche: les antérieures (les plus petites devant) et les postérieures (les plus grandes derrière) viennent vers nous deux par deux en alternant. 
Il y a longtemps et pendant longtemps, quand je me promenais dans la nature, je ne voyais, sans y prêter plus d'attention, que les évidences. Je n'entendais que le tonnerre, les conversations et les bruits de notre civilisation. Je traversais un décor.

Et puis, j'ai appris, on m'a appris aussi, à regarder au-delà des apparences, à m'oublier pour porter mon attention sur le décor, et mon univers s'est peuplé de fleurs, d'insectes, de serpents, de grenouilles. Plus tard, en découvrant les oiseaux, j'ai commencé à entendre. Maintenant, juste en fermant les yeux, je peux presque deviner le paysage qui m'entoure, savoir si je suis en pays connu ou inconnu. Quand je regarde un film, j'entends la nyctale ou l'engoulevent dans les scènes nocturnes. Je sais quand le metteur en scène me ment sur le lieu de tournage. Le silence n'existe plus. 

Aujourd'hui, j'apprends toujours, j'approfondis les détails et je comprends mieux certaines choses. Depuis quelques années, je m'intéresse aux traces et aux histoires qu'elles racontent. C'est une écriture qu'il n'est pas toujours facile de déchiffrer et qui laisse beaucoup de place à l'imagination. J'aime bien.

Un 5 janvier dans le boisé du Tremblay

Il se passe toujours quelque chose dans le boisé du Tremblay. Cette fois-ci, j'ai croisé la piste d'un lapin à queue blanche. Plus loin, en cherchant une chouette rayée dans le marais, je suis tombé sur une grande pic (Dryocopus pileatus) occupée à gosser un frêne mort que les coupeurs d'arbres avaient bien voulu laisser debout. Et encore plus loin, un groupe de grands corbeaux qui faisaient l'aller-retour entre leur perchoir et le sol m'a incité à aller vérifier à quel cadavre ils s'intéressaient. C'était un jeune cerf de Virginie déjà bien entamé.