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Un 5 janvier dans le boisé du Tremblay

Il se passe toujours quelque chose dans le boisé du Tremblay. Cette fois-ci, j'ai croisé la piste d'un lapin à queue blanche. Plus loin, en cherchant une chouette rayée dans le marais, je suis tombé sur une grande pic (Dryocopus pileatus) occupée à gosser un frêne mort que les coupeurs d'arbres avaient bien voulu laisser debout. Et encore plus loin, un groupe de grands corbeaux qui faisaient l'aller-retour entre leur perchoir et le sol m'a incité à aller vérifier à quel cadavre ils s'intéressaient. C'était un jeune cerf de Virginie déjà bien entamé.


Biodiversité du Boisé du Tremblay

Comme chaque année ou presque depuis que j’ai démarré le projet "Biodiversité du Boisé du Tremblay" sur iNaturalist, j’ai mis à jour les guides de la faune et de la flore du boisé.

Ces guides sont établis à partir des observations faites par les visiteurs, mais seules celles ayant été validées par la communauté des experts de iNaturalist et ayant atteint le calibre «Recherche» sont retenues.

Ils permettent de dresser un portrait de la vie qui anime le boisé et démontrent que la « biodiversité » n’est pas qu’un concept. En mettant en évidence la richesse d’un lieu, ils stimulent l’intérêt pour sa conservation. Ils peuvent aussi faciliter l’identification d’une plante ou d’un animal qui attire l’attention du visiteur curieux. D’ailleurs, ces guides peuvent être imprimés, téléchargés ou consultés en ligne sur un téléphone cellulaire.

Au cours de l’année 2024, plusieurs nouvelles espèces ont été ajoutées à la liste:

  • L’Amanite de Jackson devient la 22ème espèce du guide des champignons.
  • L’Adiante du Canada et l’Athyrie fougère-femelle du Nord font passer à 11 le nombre des espèces du guide des plantes se reproduisant par spores (mousses, lycopodes, fougères et alliées).
  • Le Lycope d'Europe, la Proserpinie des Marais, la Rudbeckie laciniée, la Saponaire officinale, l’Uvulaire à grandes fleurs, la Vesce des haies, l’Impatiente glanduleuse et l’Ancolie du Canada portent à 231 le nombre d’espèces du guide des plantes herbacées à fleurs.
  • Le Noyer noir, l’Hamamélis de Virginie et le Chêne blanc font grimper à 75, le nombre des espèces du guide des arbres et des arbustes.
  • 69 nouvelles espèces ont été ajoutées au guide des invertébrés qui totalise maintenant 493 espèces d’arthropodes et de mollusques.
  • Enfin, le Rat musqué et le Coyote viennent compléter la liste des 16 espèces du guide des mammifères.

En revanche, le guide des amphibiens, reptiles et poissons reste à 11 espèces et le guide des oiseaux à 122 espèces.

Je profite de l'occasion pour vous encourager à utiliser iNaturalist pour recenser la biodiversité qui vous entoure, que ce soit dans un parc, un jardin ou même une maison. C'est facile (il suffit de prendre une photo), c'est complétement gratuit, c'est utile et c'est l'occasion d'apprendre, car même si vous ne connaissez pas l'espèce, la communauté de iNaturalist l'identifiera pour vous.

Indigène mais pas spontané

Une belle surprise nous attendait hier au bord du chemin : une demi-douzaine d'hamamélis de Virginie étaient en pleines fleurs. Comme je passe régulièrement par là et que je ne les avais jamais remarqués, leur présence est probablement l'oeuvre d'un lutin jardinier bien inspiré. 

Je dois avouer que, comme tout ce qui sort des sentiers battus, j'aime bien cet arbuste qui refuse de se résigner à l'hiver alors que tous les autres ont laissé tomber leurs feuilles. Dans leur article "Many to flower, few to fruit : the reproductive biology of Hamamelis virginiana (Hamamelidacee)", Gregory J. Anderson  et James D. Hill en arrivent à la conclusion que cette floraison tardive pourrait être une stratégie évolutive qui permet à H. virginiana d'éviter la concurrence que lui fait une autre espèce d'hamamélis (H. vernalis) pour les pollinisateurs ; ce dernier fleurissant de la fin de l'hiver au début du printemps. Évidemment, cette stratégie a éte héritée des individus vivant dans les régions où les deux espèces cohabitent ou ont cohabité.

Toutefois, le prix à payer pour cette pollinisation différée et concomittante des premiers gels, en tous cas au Québec, est la raréfaction des pollinisateurs et un succès limité de la fructification puisque moins de 1 % des fécondations arrivent à terme. 

L'ogre des forêts

Hier, en me promenant dans le boisé du Tremblay, j'ai été surpris par l'abondance des tamias rayés dont les "tchip" revendicateurs animaient le sous-bois. Il faut croire que l'année leur a été profitable. 

Au retour, mon attention a été attirée par un bruissement de feuilles mortes insistant, juste derrière moi. Je ne voulais pas me retourner, suspectant la présence d'un énième tamia. Mais bon, des fois que cela aurait été un ours, j'ai fait l'effort. 

Comme il n'y a rien qui ressemble plus à une feuille morte que cet écureuil, je l'ai cherché pendant quelques secondes, jusqu'à ce que je le voie détaler avec quelque chose dans la gueule. Ayant cru identifier une couleuvre, je l'ai suivi des yeux jusqu'à une pierre sur laquelle il s'est perché pour égorger sa proie. Je n'en revenais pas.  Moi qui pensais que Tic et Tac étaient végétariens, je suis allé aussitôt m'informer sur le régime alimentaire de ce rongeur dans les bouquins et l'internet. Toutes les sources mentionnent effectivement que le tamia rayé peut se nourrir à l'occasion d'œufs et d'oisillons. Je n'ai pas vu la couleuvre, mais qui vole un œuf peut bien en voler une.   

Le prunier noir

Le 7 mai 2024

Ce printemps, j'ai eu le plaisir de trouver un prunier noir (Prunus nigra) en me promenant dans le boisé du Tremblay. Seul prunier indigène au Québec, il n'est pas rare, mais n'est pas non plus très abondant. On le trouve autour des Grands Lacs, jusqu'au sud du Manitoba vers l'ouest et jusqu'à la côte atlantique vers l'est.

Comme je voulais goûter à ces prunes, je l'ai visité régulièrement. Ce fut long, très long, mais ça en valait la peine. Le fruit de couleur orange, presque rouge, est juteux et sucré à condition de le cueillir bien mûr.   

Le 11 août 2024 et pas encore assez mûre

Plutôt un caryer ovale

Il y a quelques jours, je m'interrogeais - ici - sur l'identité d'un gros bourgeon que je n'avais jamais remarqué auparavant, au bord d'un chemin du Boisé du Tremblay. Avec un peu de patience et de persévérance, je peux dire aujourd'hui que je me trompais et qu'il s'agit d'un caryer ovale (Carya ovata). Les feuilles qui me paraissaient palmées sont plutôt imparipennées, c'est-à-dire composées de folioles en nombre impair ; cinq en l'occurence.

Un marronnier ?

Il y a quelques jours, à l'occasion d'une ballade dans le boisé du Tremblay, mon attention a été attirée par un gros bourgeon sur le bord du chemin. Intrigant ! Je n'avais jamais rien vu de semblable auparavant et en dépit de ses quatre ou cinq centimètres de longueur, il m'avait complétement échappé jusqu'à ce jour. J'inspectai autour pour voir si l'arbre auquel il appartenait était seul, mais j'en vis trois autres un peu plus loin. Curieux, je me promis de revenir régulièrement pour surveiller l'ouverture du bourgeon dans l'espoir d'identifier l'essence.

Hier, il était ouvert, laissant apparaitre le nouveau rameau et quelques feuilles qui semblent composées et plutôt palmées. Est-ce que cela pourrait être un marronnier ? Il y en a trois au Canada. Deux ont été introduits : le marronnier d'Inde (Aesculus hippocastanum) et le marronnier rouge (Aesculus pavia). L'autre, le marronnier glabre (Aesculus glabra) est indigène, mais plutôt rare. Comme c'est un arbre qui aime les milieux humides, il serait dans son élément au boisé du Tremblay.

Je vais suivre la croissance des feuilles en espérant que les cantonniers qui entretiennent le chemin et qui ont entrepris de couper toutes les branches basses des arbres en bordure fassent comme moi, qu'ils passent sans le voir. En attendant, si les photos vous évoquent quelque chose, n'hésitez pas à me renseigner. 


Matin chantant

Une grive solitaire, mais pas pour longtemps. 

Les migrations vont bon train dans le boisé du Tremblay. On commence à voir des grives solitaires depuis trois jours et des trains entiers de bruants défilent sous nos yeux. Certains, comme ce bruant des marais, en descendent pour poser leurs bagages. Poitrine gonflée, calotte hérissée, il défie ses congénères au chant et s'ils font mieux que lui, il ira voir ailleurs sans discuter. Soudain, l'arrivée d'un groupe d'oiseaux noirs et bruyants lui font rabattre son caquet et sa casquette.

L'attente a porté fruit

Il s'est écoulé 64 jours entre ces deux photos du Cerisier de Virginie qui pousse derrière la clôture.


 

Éthologie (à deux sous) des mangeoires

Après le verglas de cette nuit, je suis allé vérifier si les mangeoires anti-écureuils n'étaient pas bloquées par le gel; le principe de fonctionnement étant qu'un animal trop lourd ferme l'accès aux graines en faisant coulisser les perchoirs vers le bas.

Comme à chaque fois, je me suis laissé captiver par le manège des oiseaux, observant les hiérarchies et les stratégies qui règlaient leur trafic. 

La loi première qui semble être la même que chez les humains - preuve que ces derniers ne sont pas encore parvenus à s'extraire de leur condition animale - est celle du plus gros ou du plus fort. Selon cette règle, les roselins familiers s'imposent sur les chardonnerets jaunes. 

Le va-et-vient des mésanges à tête noire, pourtant plus petites, mais indifférentes aux autres, pourrait infirmer cette règle. En réalité, elles ne sont que l'illustration d'un corollaire. La force et la taille ne valent rien; elles ne sont ni bonnes, ni mauvaises, mais ne dépendent que de la volonté qui les anime. Or, ceux qui connaissent les mésanges savent qu'elles n'ont peur de rien. D'ailleurs ne viennent-elles pas manger dans nos mains ?

Une seconde loi est celle du nombre et de l'union. Si les chardonnerets jaunes profitent d'une absence des roselins pour accéder aux mangeoires et s'ils ne sont pas divisés par leurs querelles intestines, ils peuvent tenir la position un certain temps.

Enfin, en observant les interactions entre les mâles (en rose) et les femelles (en brun) des roselins familiers, j'ai eu l'impression que leur société était plutôt égalitaire ou légèrement matriarcale en ce qui a trait aux relations entre les sexes.  

Toujours là

Première grosse bordée de neige, premiers bruants hudsoniens. Je les soupçonnne de l'avoir amenée avec eux. Quant aux mésanges bicolores, comme prévu, elles sont toujours présentes, mais il faut être là au bon moment pour les voir, car elles sont toujours aussi furtives. Cela ne m'étonnerait pas qu'elles nichent dans le boisé l'année prochaine, à moins que cela se soit déjà produit cette année.

Une histoire du boisé du Tremblay: les années 2000

Le roman-photo d'une friche agricole qui rêvait de devenir un refuge faunique et ne deviendra qu'un parc municipal, par quelqu'un qui aime la nature pour ce qu'elle est.

Les belles années

Les saisons passaient sur ces terres agricoles retournées à la sauvagerie. En une cinquantaine d'années, aubépines, chèvrefeuilles et cornouillers avaient pavé la voie aux peupliers et aux bouleaux venus combler l'espace entre quelques vieux frênes-jalons de rangs et les reliques de l'érablière à caryer et à sucre.

Le relooking

De l'avis des développeurs de l'économie à courte vue, cet abandon n'était ni tolérable ni rentable et il fallait absolument trouver un moyen de refaire du blé avec ces terres; c'est-à-dire asphalter, bétonner, vendre, louer et faire payer des taxes. Heureusement, la forêt pouvait compter sur Tommy Montpetit, un enfant qu'elle avait vu grandir et qui réussit, après de nombreuses années de lutte, à convaincre la ville qu'il fallait protéger le lieu et les créatures extraordinaires qui l'habitaient.  


Le retour de l'humanité

Pourquoi se contenter de protéger et de regarder pousser ? Think big et valorise. Ainsi fut-il et nous eûmes ce que nous méritions: des pistes multifonctionnelles, des bancs, de la compensation carbone (plus valorisant que de replanter des arbres qu'on a coupé), des chiens, des vélos, des joggeurs et des stationnements pour les accueillir.

  

Un 1er décembre dans le boisé du Tremblay

Un écureuil gris en plein bond vers la gauche (l'artefact fait 5,5 cm de long)
Et un saule qui va trouver l'hiver, long

Ces arbres qui font peur

Maintenant que l'agrile du frêne est passé sur le boisé du Tremblay, il faut sécuriser les lieux. Cela revient à couper tous les arbres morts au pied, sur une bande d'une quinzaine de mètres de chaque côté d'un chemin déjà trop large. Et puisqu'on s'est donné une mission de gestion et de valorisation de ce milieu qui n'en demandait pas tant, on coupe par la même occasion toutes les autres essences qui penchent du mauvais côté ou qui ont pour seul défaut d'être trop gros et trop vieux. Bref, après avoir installé des bancs (mais pas de poubelles) et des bornes d'appels d'urgence (tout en autorisant la chasse) pour procurer aux passants un faux sentiment de sécurité, on continue à transformer le boisé en un jardin pour vieux enfants insécures.

Si je reviens sur le sujet pour la énième et dernière fois, c'est parce que je me suis toujours demandé quel risque réel faisait courir ces arbres morts aux promeneurs et que j'ai enfin pu trouver quelques éléments de réponse. En faisant une brève recherche dans Google Scholar avec les mots-clés: "falling tree", "fatalities" et "injuries", on trouve quelques études sur le sujet. Après avoir écarté celles qui portent sur les accidents de travail en foresterie et les accidents non-professionnels causés par l'entretien d'un arbre, il n'en reste que très peu; ce qui, en soi, peut constituer un indice sur le risque. Je me contenterai de citer quelques chiffres. 

En Australie, Andrew Brookes s'est intéressé aux accidents mortels causés par des arbres au cours d'activités scolaires extérieures. Entre 1960 et 2007, sur 128 décès enregistrés, 14 (au cours de 8 évènements différents) étaient attribuables à une chute d'arbre: 50 % étaient dus à des mauvaises conditions météorologiques et 50 % se sont produits alors que les victimes étaient dans leur tente. 

Aux États-Unis, Thomas W. Schmidlin s'est focalisé sur les chutes d'arbre causées par le vent et a recensé 407 morts entre 1995 et 2007, soit 1 mort par an et par tranche de 9 millions d'habitants. 44 % des victimes ont été tuées dans leur véhicule, 38 % à l'extérieur et 18 % dans leur foyer (maison, mobil-home ou autres). 

Au Royaume-Uni, au cours de la décennie 1998-2008, David J. Ball et John Watt ont dénombré 54 morts et 22 blessures graves causées par la chute d'un arbre ou d'une branche. 59 % des cas se sont produits sur une voie de circulation et impliquaient un véhicule; les autres ont eu lieu dans un jardin privé, une forêt, un parc ou une aire de jeu. Dans 64 % des accidents, les vents soufflaient à plus de 75 km/h. Avec une population moyenne de 60 millions d'habitants au cours de cette décennie, ces chiffres signifient que, chaque année, un(e) anglais(e) sur 8 millions environ court le risque d'être gravement blessé(e) ou tué(e) par un arbre.   

Dans cette dernière étude, les auteurs arrivent à la conclusion que "les décès et les blessures graves causés par les arbres sont rares au Royaume-Uni. En outre, il y a peu de chances que le nombre de cas puisse être réduit de manière significative sans des mesures strictes qui pourraient elles-mêmes causer d'autres formes de dommages à l'environnement ou à la main-d'œuvre. "

Allez savoir pourquoi ces bouleaux gris ont été coupés. 
Pas de jaloux, on coupe aussi les peupliers faux-trembles

Pour résumer, s'il fallait vraiment trouver des raisons de s'inquiéter, on pourrait prétendre que circuler dans une automobile sur une route bordée d'arbres ou dormir dans une tente plantée au pied d'un arbre mort par journée de grands vents présente un certain niveau de risque. Rien de comparable, toutefois, avec les dangers que nous courons quotidiennement. En fait, selon les gestionnaires de risque, l'abattage préventif des arbres serait plutôt motivé par la crainte, de la part des propriétaires de terrain boisé, de la poursuite judiciaire et de ses coûts en cas d'accident (voir les références ci-bas) que par un réel souci de sécurité.

Pour clore le sujet, je rappellerai qu'un arbre mort est utile. Et si on ne peut faire autrement que de le couper, peut-être pourrait-on envisager des méthodes plus respectueuses de l'environnement comme par exemple couper un peu moins court de façon à laisser les espèces animales qui nichent ou s'abritent dans les cavités des troncs continuer à le faire.

Sources: 

  1. Ball, D. J. & Watt, J. The risk to the public of tree fall. Journal of Risk Research 16, 261–269 (2013).
  2. Schmidlin, T. W. Human fatalities from wind-related tree failures in the United States, 1995–2007. Nat Hazards 50, 13–25 (2009).
  3. Brookes, A. Preventing death and serious injury from falling trees and branches. Journal of Outdoor and Environmental Education 11, 50–59 (2007).
  4. Bennett, L. Trees and public liability—Who really decides what is reasonnably safe? Arboricultural Journal 33, 141–164 (2010).

Si vous connaissez Sci-Hub (qui tentent de redonner l'accès gratuit aux résultats des recherches financées par l'argent public) et ses extensions pour navigateurs internet , vous n'aurez pas de mal à trouver l'article manquant.