Tétras du Canada, Falcipennis canadensis, Spruce Grouse

Décidément, en ce 3 juillet 2012, la tourbière du parc national de Frontenac (Québec, Canada) nous réservait de bien belles surprises.
Ce fut d'abord un bruit sourd et une ombre en mouvement qui attira notre attention à quelques pas devant nous. Nous savions alors que nous venions de déranger un oiseau. Tout doit ensuite se passer très vite: on balaye rapidement l'horizon du regard pour voir si on ne peut pas le repérer et l'identifier en vol. Si on ne voit rien et qu'on n'entend pas de battements d'ailes, c'est peut-être qu'il s'est posé à proximité. Alors on reste sur sa position et on regarde autour.
Et là, à gauche, à hauteur du regard sur une branche basse, un mouvement nous révéla un poussin que nous avons d'abord identifié comme une Gélinotte huppée, d'une part parce que nous ne connaissons pas bien les traits distinctifs des poussins des différentes espèces de tétras et de gélinotte, et aussi parce que cela nous semblait le plus probable.
Comme un poussin seul, cela n'a pas trop de sens. Nous avons cherché la mère. Effectivement, elle n'était pas loin, perchée dans une épinette de l'autre côté du chemin, visiblement sur le qui-vive et pour cause. Nous nous sommes alors avancés de quelques pas pour lui faciliter le passage vers ses rejetons et faire retomber le stress, tout en prenant soin de ne pas la regarder pour lui laisser croire que nous ne l'avions pas repérée et ne pas la faire fuir. Comme il se doit, elle alla les rejoindre et commença à émettre des gloussements discrets pour les rassembler. Nous en avons compté cinq ou six sortant de nulle part.
C'est en voyant l'adulte que nous avons évidemment compris que nous étions en présence de Tétras du Canada; ce qui, en cette période de relevés pour l'atlas des oiseaux nicheurs du Québec, confirme sa nidification jusqu'ici supposée dans le secteur du Parc de Frontenac.
Certes, les images qui suivent ne sont pas toujours d'une grande qualité, mais elles permettent quand même de reconnaître l'animal.

Plantes carnivores

Les plantes carnivores puisent dans la digestion des animaux l'azote (N) et le phosphore (P) qu'elles ne peuvent pas trouver dans le sol. On les rencontre dans les tourbières, ces milieux acides, riches en matière organique d'origine végétale mais peu ou pas décomposée; ce qui rend les éléments sus-cités impossibles à assimiler. 

Il y a de moins en moins de tourbières accessibles au Québec. Les plus proches, celles du sud, ont été exploitées jusqu'à leur épuisement par les marchands de tourbe. La plus près de Montréal est celle de Lanaudière. Un peu plus loin vers l'est, il y en a une autre, magnifique: celle du parc national de Frontenac. C'est une tourbière minérotrophe (fen), c'est-à-dire en contact avec la nappe phréatique et alimentée par les eaux de ruissellement, par opposition à la tourbière ombrotrophe (bog) dont l'alimentation en eau dépend des précipitations.

Au moment de notre passage (première semaine de  juillet), au moins trois plantes insectivores étaient en fleurs:

La Sarracénie pourpre qui piège les insectes dans ces feuilles en cornet remplies d'eau de pluie. Dans son cas, la décomposition des proies est assurée par des bactéries en solution dans l'eau.




La Droséra à feuilles rondes qui forme de larges colonies sur la sphaigne. Ses feuilles sécrètent un suc collant rempli d'enzymes digestives.


L'utriculaire cornue couvre la tourbière de tapis jaunes. La flore laurentienne la décrit comme étant plutôt terrestre. Nous ne l'avons observée qu'immergée, dans la partie réticulée de la tourbière. De toute façon, elle ne laisse voir que sa fleur; l'appareil digestif constitué de petits sacs (utricules) est souterrain ou immergé, c'est selon.


Amiante

Il y a des régions qu'il faut vouloir visiter pour un jour y poser les pieds; celle de l'amiante (Chaudière-Appalaches, Québec, Canada) en fait partie. C'est une région bien particulière car c'est une des seules parties du monde où l'amiante n'est pas dangereux. Ici, on en fait même des bardeaux pour le revêtement extérieur des maisons. Et puis, vous n'avez qu'à lancer dans la conversation: "L'amiante, ouais...ce n'est pas dangereux ?" pour qu'on vous réponde inévitablement: "Mon grand-père a travaillé à la mine toute sa vie et il n'a jamais eu de cancer."
Ainsi soit-il. Le mien a fumé toute sa vie et il n' a même pas eu un soupçon d'emphysème. Il faut croire que les grand-pères sont à l'abri de tout. D'ailleurs n'est-ce pas pour cela qu'ils vivent si vieux ?


L'amiante est un terme un peu vague pour désigner toutes sortes de minéraux fibreux. Dans la région de Chaudière-Appalaches, il s'agit du chrysotile, un silicate de couleur blanche qui est associée à la serpentine; la serpentine  étant une famille de minéraux dont certains ont une couleur verdâtre et auxquels la cristallisation a donné une vague apparence de peau de serpent. Les serpentines sont des roches métamorphiques, c'est-à-dire qu'elles ont été transformées par la chaleur et la pression du sous-sol, et en l'occurence du manteau supérieur. Dans la région, c'est la tectonique des plaques qui nous les a révélées.


À une époque où les étoiles n'occupaient pas tout à fait la même position qu'aujourd'hui (600 millions d'années auparavant), l'océan Iapétus séparait les continents Laurentia (Amérique du Nord et Groenland), Avalonia (Terre-Neuve, Nouvelle-Écosse, Nouvelle-Angleterre, Irlande méridionale, Angleterre, Pays de Galles, Belgique, nord de la France, Pays-Bas, moitié nord de l'Allemagne et nord-ouest de la Pologne) et Baltica (Scandinavie, Pays baltes, nord-est de la Pologne, nord-ouest de la Russie, Biélorussie et nord de l'Ukraine). Je vous passe les détails, mais la dérive des continents a fait en sorte, il y a 420 millions d'années, qu'un arc insulaire venant du sud a percuté Laurentia, faisant disparaître Iapétus et donnant naissance à la chaîne des Appalaches. Puis une seconde collision entre Laurentia et Baltica a fini le travail. C'était juste avant l'apparition de l'Océan Atlantique. Toutes ces collisions, glissements de plaques et plissements ont permis à des fragments métamorphisés du fond de Iapétus, ce qu'on appelle des ophiolites, de remonter du sous-sol et d 'affleurer dans la région de Thetford Mines.

La première chose qui impressionne quand on arrive, ce sont les immenses terrils qui barrent l'horizon de la ville; aussi haut que les montagnes alentours, mais nus. Le guide payé par la compagnie vous expliquera qu'ils sont stériles mais qu'à la longue, la végétation finit par y repousser et qu'ils perdent de l'altitude en se compactant. L'environnementaliste, qui a du mal a trouvé des subventions, vous dira que rien n'y pousse à moins d'un apport de compost tellement coûteux que le projet est tombé à l'eau. Il vous apprendra aussi que le ruissellement entraîne les résidus miniers dans les lacs qui se comblent. Certains ont déjà disparu, les autres attendent leur tour mais sont déjà si peu profonds que les eaux ne sont plus assez froides pour y abriter la vie.

Mais, oublions un instant le vilain pour nous concentrer sur le beau. Et du beau, il suffit  de se pencher pour en trouver. Les résidus miniers n'ont peut-être aucune valeur aux yeux des compagnies minières, mais ils font la joie des géologues amateurs qui ne savent pas toujours le nom des minéraux qu'ils tiennent entre leurs mains, mais qui savent néanmoins en apprécier la beauté.
Cela m'a même permis de renouer avec des épisodes heureux de mon enfance au cours desquels je traînais mes parents dans les mines désaffectées à la recherche de minéraux et de fossiles.