Ambroisie à feuilles d'Armoise, Ambrosia artemisiifolia, Small Ragweed

Après l'apocyn à feuilles d'Androsème, voici un autre nom digne de figurer dans un recueil de poèmes. Pourquoi pas un deuxième tome des "Fleurs du mal" ? L'ambroisie est en effet mieux connue sous le nom d'herbe à poux. Il en existe au moins deux espèces au Québec: la petite et la grande. Celle-là, c'est la petite. La grande a des feuilles moins découpées et elle est plus grande.  
Les fleurs, comme beaucoup d'entre nous, ont besoin du regard des autres pour exister. Jalouse de ne pas attirer l'attention des promeneurs avec ses grappes de petites fleurs verdâtres insignifiantes, l'ambroisie aurait fait n'importe quoi pour sortir de l'anonymat.
Et on peut dire qu'elle a réussi. Comme une de ses compatriotes célèbres (CD pour ne pas la nommer), dès qu'elle l'ouvre (la fleur, pas la bouche), elle provoque énormément de réactions. Certains reniflent, d'autres pleurent ou attendent que ça passe. Tout le secret de son succès tient à son pollen très allergène. Débarquée en Europe au milieu du XIXème, le nombre de ses fans n'a cessé d'augmenter depuis et son rayonnement est devenu international.
Comme toutes les stars, elle a ses légendes et une autre version de l'histoire suggère qu'elle serait une arme développée par la nature pour nous inciter à moins utiliser nos automobiles. Des scientifiques australiens ont ainsi montré que la production de pollen augmente en fonction du taux de gaz carbonique dans l'air: Rising CO2 and pollen production of common ragweed (Ambrosia artemisiifolia L.), a known allergy-inducing species: implications for public health., L.H .Ziska and F.A. Caulfield, Australian Journal of Plant Physiology 27(10) 893 - 898. 2000.
Ça fait presque peur.  


Le boisé des douze

La magie existe...puisqu'on lui a donné un nom. Vieil arbre-sentinelle dressé au milieu d'un champ, parc ou terrain vague dans la ville, Montérégienne épargnée par la construction, elle prend parfois des formes inattendues. Mais ne pas la reconnaître ne signifie pas qu'elle ne s'exerce pas par endroit et que nous n'y sommes pas sensibles. Sinon, comment expliquer l'arbre encore debout au milieu du champ ou le terrain vague oublié des promoteurs ?

À Saint-Hyacinthe (Québec), la magie, celle qu'on appelle des lieux, protège un ruisseau et les quelques arpents d'arbres qui le cachent au fond de sa ravine. Cerné par une zone industrielle, des terres agricoles et deux voies ferrées, soumis au déversement des déchets et au ruissellement des pesticides, le boisé des douze a survécu au temps. Il est là intact; son ruisseau serpentant comme avant le temps du remembrement et de la rectitude trompeusement productiviste.
Valériane officinale
On n'arrive pas là par hasard et même après avoir traversé la banlieue de Sainte-Hyacinthe puis la zone industrielle, les lieux sont si peu accueillants qu'on en vient à se demander si les satellites n'étaient pas occupés à admirer le ciel étoilé quand ils auraient dû enregistrer les coordonnées GPS. Mais, c'est à ce moment là qu'on aperçoit le panneau signalant l'entrée et qu'on se sent obligé, presque à contre-cœur de descendre de la voiture.
Asclépiade commune
Aussitôt franchi le seuil, le charme opère. Pourtant, rien n'a fondamentalement changé et en se retournant les entrepôts sont toujours là. Ils semblent simplement beaucoup plus loin, d'un seul pas. De l'autre côté, c'est le pré, premier degré de l'abandon au naturel. Valérianes, achillées, trèfles rouges, verges d'or, mélilots, asclépiades, graminées, butineurs de tout acabit, tout est en place. Et, imperceptiblement, la notion du temps s'altère.
Salsifis des prés
La marche devient saccadée, le regard erratique, l'ouïe se rappelle à nos sens. Pas question de retourner en arrière ! Même si on le peut, on ne le veut surtout pas. Au lieu de cela, on s'avance et on finit par se buter au monde des arbres. Il semble impénétrable. On devine que la lisière est plus qu'une frontière entre deux strates, qu'elle dissimule un changement de relief, une pente et on veut en savoir plus. On suit donc le chemin, espérant trouver une brèche pour aller au-delà.
Chèvrefeuille du Canada
Prunier noir
Chèvrefeuilles, framboisiers, cerisiers, pruniers, noisetiers, cardinaux et roitelets, il y a tellement de choses à voir, à sentir et à écouter qu'on en oublie le but. Plus loin, des parulines masquées, bandits de petits chemins, viennent nous saluer et l'esprit vagabond du raton-laveur croise notre route.
Noisetier à long bec
Framboisier sauvage
Autant dire que rendu ici, on ne sait plus trop quand et où, c'est. On continue emporté par le sentier, et ce à quoi on ne songeait plus se produit soudain; une traverse se propose de nous conduire au ruisseau. Il y en aura d'autres tout au long du parcours. Après quelques secondes d'hésitation - la pente semble raide - on se laisse emporter jusqu'au courant qui glisse entre les saules géants venus tremper leurs orteils, étrangement rouges au mois de juin.
Et ça, qu'est-ce que c'est ?.......
Rumex crépu
Malheureusement, je ne peux en dire plus car on nous a fait promettre de garder le secret. Et, puis, où serait le plaisir de la découverte si tous les mystères étaient dévoilés ? Une dernière chose quand même, la magie n'est pas seule responsable de la préservation des lieux. Elle a su se faire aider par un groupe de passionnés qui méritent bien d'être encouragés. Vous trouverez toute l'information nécessaire sur leur site : La réserve naturelle du Boisé-des-Douze, en particulier l'origine de ce nom étrange.

Apocyn à feuilles d'Androsème, Apocynum androsaemifolium, Spreading Dogbane


Le nom est un poême en soit et fait référence à une espèce de millepertuis européen. Très commune, on la trouve au bord des chemins. En la regardant de plus près, on peut facilement tomber sous son charme. D'ailleurs beaucoup d'insectes s'y sont laissé prendre Pour puiser son nectar, ils doivent en effet glisser leur trompe ou ce qu'il leur fait office de bouche dans les interstices ménagés entre deux étamines. Atteindre le liquide gluant n'est pas un problème; s'arracher à ce piège collant est en revanche un défi que seuls les plus forts surmontent, comme la chrysomèle de l'apocyn, par exemple.
Au Québec, la plante est aussi appelée herbe-à-puce car le contact de son latex peut provoquer des réactions cutanées chez certaines personnes. Elle est cependant beaucoup moins agressive que Rhus radicans, la véritable herbe-à puce.