Un premier août sur le mont Saint-Grégoire

C'est en arrivant au pied de cette colline montérégienne que je me suis rendu compte que je n'y étais jamais venu. Oubli corrigé. Après tout, ce pluton de 125 à 145 millions d'années, témoignage du passage du Québec sur un point chaud, ne fait que 250 mètres d'altitude et on ne part pas de zéro.

Pour arriver à son sommet et à son inévitable relai d'antennes microondes, il faut traverser une belle érablière à caryer et à tilleul. À en juger par les cabanes à sucre qui assiègent le mont, les érables sont en santé. Arrivé tôt pour éviter la cohue, nous n'avons pas vu grand chose à part cette gesse des bois et une bande d'urubus à tête rouge qui jouaient dans les thermiques.

Festival des couleurs

Cette année, les couleurs de l'automne ont pris un peu d'avance dans le boisé du Tremblay et j'ai comme l'impression qu'il n'y a pas que les feuilles qui vont tomber. Tous ces points orange sur trois kilomètres, ça n'use pas que les souliers des scouts, ça entame aussi le moral du naturaliste.

Il faut croire que le responsable de l'environnement de la ville de Longueuil, fort de son Master of Business Administration et pressé par le citoyen craintif que les arbres lui tombent sur la tête (mais pas que le coronavirus pénètre dans ses poumons, sinon il porterait un masque), a décidé qu'il fallait couper tous les frênes morts ou mourants.

Et tant qu'à faire, on coupera large. Forcément, un MBA connaît l'économie d'échelle, à défaut de l'écologie d'une forêt et de l'intérêt des arbres morts pour la faune locale; pensons juste aux pics qui y nichaient au printemps.

Un 24 juillet dans les marais de Pointe-aux-Prairies


Un vendredi, tôt le matin, nous étions seuls ou presque à nous promener dans ce parc-nature de la pointe orientale de l'Île de Montréal. Cela faisait bien une dizaine d'années que nous n'y avions pas mis les pieds et j'ai été heureux de constater qu'il avait plutôt bien évolué. Bien sûr, comme partout, des vieux arbres ont été abattus. À qui faisaient-ils ombrage ? Leur âge vénérable a du donner le vertige à un gestionnaire qui ne pouvait envisager d'horizon plus lointain que celui de son année budgétaire. Il ne nous restait plus qu'à déplorer et à poursuivre une ballade qui nous réservait quelques bonnes surprises, à commencer par un parterre de monardes fistuleuses.

Monarde fistuleuse

Moins éclatante que la monarde écarlate importée des États-Unis pour colorer nos jardins, elle partage avec cette dernière les mêmes vertus thérapeutiques contre certaines infections respiratoires. Question goût, elles sont un peu différentes. Celui des feuilles de la monarde écarlate ressemble à s'y méprendre au thym et on peut les substituer sans problème en cuisine; ses fleurs apportent une note sucrée supplémentaire. La monarde fistuleuse a, quant à elle, un  goût prononcé qui tire plutôt vers la menthe (cette appréciation n'engage que moi).
Les monardes n'étaient pas les seules médicinales du parc qui s'est avéré être une véritable pharmacie. Parmi les plus remarquables, nous avons trouvé de l'agripaume cardiaque, que je n'avais jamais vu ailleurs que dans mon jardin, de la vipérine et des grandes aunées; toutes des eurasiennes. C'est à se demander si les sœurs recluses qui vivent dans le monastère voisin n'entretiennent pas un jardin de simples dont il se serait échappé quelques graines.

Grande Aunée

Et puisqu'on parle de la grande Aunée (Inula helenium), aussi appelée Inule aunée, saviez-vous qu'elle avait donné son nom à l'inuline, un sucre complexe que l'on trouve en grande quantité dans sa racine comestible.
L'inuline est considérée comme une fibre alimentaire (car non digestible) capable de limiter la glycémie post-prandiale (taux de sucre dans le sang après un repas) et comme un prébiotique (car stimulatrice de la flore intestinale).
Mais ce n'est pas tout à propos de l'aunée. Dans une étude récente publiée au mois d'avril 2020 (à lire ici), elle a été retenue comme candidate pour fournir des molécules potentiellement actives contre le virus de la COVID.