Un 9 octobre dans la tourbière de Villeroy

La tourbière de Villeroy, d'une superficie d'environ 1500 hectares, est l'une des grandes tourbières du Québec méridional à nous avoir survécu. Beaucoup ont été exploitées pour la tourbe ou drainées pour en faire des terres cultivables. 

Située au bord de l'autoroute 20 entre Montréal et Québec, je suis passé de nombreuses fois à côté sans soupçonner son existence. Il faut dire que le secret est bien gardé, trop peut-être, et que même avec des coordonnées GPS, on a plus de chances de se retrouver dans l'aire de repos de l’autoroute que dans le stationnement de l'entrée de la tourbière. D'ailleurs, sans l'aide d'une riveraine qui nous remit sur le droit chemin, je crois bien que nous aurions renoncé.

Finalement, après un kilomètre de slalom entre les trous d'eau d'un chemin défoncé par les 4x4, nous avons atteint le départ du sentier. D'entrée de jeu, rien ne laisse supposer qu'il nous dirige vers une tourbière puisque la marche commence dans une forêt mixte d'épinettes, de bouleaux et de peupliers qui recouvre ce que j'ai d'abord pris pour un esker mais qui s’avère être d'anciennes dunes façonnées par des vents qui soufflaient il y a 8500 à 11000 ans sur le littoral sans relief de la mer de Champlain, juste après que les glaciers se soient retirés.

Après avoir franchi ces dunes fossiles, le paysage change rapidement. Le sol s'aplanit, les arbres se dispersent et au sol, les mousses se font de plus en plus présentes, jusqu'à occuper tout l'espace un peu plus loin. C'est là que commence le trottoir de bois; enfin ce qu'a bien voulu nous en laisser la végétation. Cette passerelle, seul moyen de navigation sur la tourbière, est le signe que nous touchons au but. Et effectivement, le paysage change une dernière fois pour laisser place à quelques épinettes noires rabougries et à des mélèzes à peine plus fiers qui flottent avec un rassemblement hétéroclite d'éricacées à la surface d'un océan de sphaignes aussi rougeâtres que spongieuses. Pas de doute, nous sommes dans la tourbière. Sous nos pieds, le sol est vivant. La matière organique s'y accumule sans se décomposer depuis 11000 ans et son épaisseur varie entre un et cinq mètres selon le relief des dunes qui constituent le soubassement.

L'acidité du sol sol fait en sorte que la matière organique s'y conserve bien et pour connaître l'histoire des lieux, il suffit d'interroger la tourbe; ce que n'ont pas manqué de faire quelques chercheurs (lire la référence disponible ci-dessous). 

Ainsi, il y a environ 11000 ans (l'holocène), 10700 selon les analyses,  il y avait là, entre les dunes, des étangs saumâtres et peuplés de la même vie qu'aujourd'hui: des crustacés (Daphnia), des bryozoaires (Cristatella mucedo) et des plantes (des Najas flexilis, des Potamogeton sp, des Hippuris vulgaris, des Ranunculus aquatilis, des Menyanthes trifoliata, des Nymphaceae et des Chara sp). Puis, il y a 9300 à 10000 ans, les carex et les mousses ont commencé à combler les étangs qui se sont progressivement entourbés. Autour, les épinettes, les mélèzes, les aulnes, les thuyas et les bouleaux colonisaient les dunes. Peut-être ces arbres ont-ils permis à des paléoaméricains d'alimenter leur feu et de construire des abris ?

Source:
Larocque, M. (UQAM), Colpron-Tremblay, J. (Université Laval, CEN), Lavoie, M. (Université Laval, CEN) & Tremblay, L. (UQAM). (2013). Écohydrologie de la Grande Tourbière de Villeroy. À lire ici.


----------
Cet article a nécessité 5 heures de recherches, de retouches photos, de rédaction et de mise en page.

Un 8 octobre dans la campagne de Sainte-Apolline-de-Patton

Tandis que les grosses pluies d'hier cherchaient leur chemin vers l'océan, nous, nous avancions sans autre but que de profiter de l'instant; ce qui n'est pas si évident quand le vent ne dépasse pas 8°C. Heureusement, nous nous contentons de peu et la dentelle de pic maculé, les polypodes des Appalaches (en tout cas, cela y ressemble beaucoup) et le groupe de vingt dindons sauvages rencontrés sur notre chemin ont réussi à faire notre bonheur.

Bleu polyéthylène

Une randonnée dans le parc régional des Appalaches nous a conduit au sommet du Mont Sugar Loaf  à travers des érablières en exploitation. Ici, le rouge érable a déjà cédé la place au bleu polyéthylène des tuyaux qui permettront de récolter la sève sucrée au printemps prochain.

Nous ne sommes qu'à 5 km du Maine, à gauche